ZURICH — Après près d'un mois de déboires financiers, le groupe suisse de raffinage Petroplus a annoncé mardi qu'il se dirigeait vers la faillite faute d'un accord avec ses banques, laissant ses quelque 2.500 employés face à un avenir très incertain.
Quelques heures plus tard, sa filiale française, basée sur le site de la banlieue rouennaise de Petit-Couronne (Seine-Maritime), a déposé son bilan et s'est placée en cessation de paiement "pour protéger la société après l'annonce de l'insolvabilité de la maison-mère".
Des représentants des 550 employés de la raffinerie française ont été reçus en fin de journée par le ministre de l'Industrie Eric Besson, alors que le sort de Petroplus s'est invité dans la campagne présidentielle.
Le dépôt de bilan permettra de payer les salaires de janvier et d'empêcher la saisie des actifs à Petit-Couronne, a souligné le ministre.
Pour M. Besson, l'objectif du gouvernement reste une reprise d'activité, pour laquelle "différents candidats" ont été reçus.
Petroplus est désormais dans une situation équivalente à "un défaut de paiement" pour les 1,75 milliard de dollars (1,3 milliard d'euros) de dette accumulée par le premier raffineur européen indépendant. Le groupe a indiqué qu'il allait donc demander sa mise en faillite ou un sursis concordataire.
Les annonces du groupe suisse, surexposé à la crise du raffinage européen parce qu'il n'est pas présent sur d'autres créneaux pétroliers, ont annihilé sa valeur en Bourse: le titre a terminé sur un plongeon de 83,7%, à 0,24 franc suisse.
La situation s'annonce très incertaine pour les salariés, répartis entre les cinq usines de Petit-Couronne, de Coryton (Grande-Bretagne), Anvers (Belgique), Ingolstadt (Allemagne) et Cressier (Suisse), à la capacité cumulée de 667.000 barils de brut par jour.
Le directeur général de Petroplus, le Français Jean-Paul Vettier, a indiqué être "entièrement conscient de l'impact que cela (la faillite, ndlr) aura sur nos employés, leurs familles et les communautés où nous avons été actifs".
Le syndicat suisse Unia a "exigé" mardi que les salaires des employés de Petroplus soient "garantis", et a lancé un appel aux autorités pour faciliter une reprise du site helvétique de Cressier.
Le syndicat estime "scandaleux que l'avidité et le manque de scrupules de +hedge funds+ et de managers aboutissent à la mise en danger" des 2.500 emplois de Petroplus. Le raffineur est détenu à environ 50% par le fonds d'investissement Carlyle, qui avait introduit l'autre moitié en Bourse en 2006.
Au Royaume-Uni, la raffinerie de Coryton a suspendu ses ventes lundi et annoncé à son millier d'employés qu'elle ne savait pas quand elle redémarrerait.
"La perte de mille emplois dans l'Essex aura un effet dévastateur sur l'économie locale", a déclaré sur la radio publique BBC le député européen travailliste Richard Howitt. Selon lui, la moitié des employés, des sous-traitants, ont déjà reçu leur lettre de licenciement.
Dans l'immédiat, le "flou" demeure aussi sur le montant que les actionnaires de Petroplus vont pouvoir récupérer, ont souligné les analystes de la Banque cantonale de Zurich (ZKB).
Ils soulignent qu'il s'agit du "pire scénario possible pour la société", qui avait annoncé des premières difficultés fin décembre 2011 et l'arrêt de plusieurs raffineries dont Petit-Couronne début janvier.
Le groupe avait alors indiqué qu'une ligne de crédit d'environ un milliard de dollars, jugée "indispensable" au bon fonctionnement de ses opérations, avait été gelée par ses banques.
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